Une leçon de la faillite de Neiman Marcus

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Brève chronique de cette faillite

Le 7 mai, en pleine pandémie du coronavirus, le détaillant de luxe propriétaire des marques Neiman Marcus, Bergdorf Goodman, Mytheresa, Horchow et Last Call, Neiman Marcus Group a déposé son bilan.

Pour cette démarche a été invoqué le chapitre 11 du US Bankruptcy Code : la société devra se soumettre à une réorganisation de ses activités, dettes et actifs et élaborer un plan pour surmonter ses problèmes financiers, sans nécessairement avoir à fermer ses magasins. Au cours de cette période de protection, toutes les actions coercitives des créanciers seront suspendues, garantissant que la société ne risque pas d’être expulsée de ses sites ni de perdre des biens et des marchandises.

Dans l’attente d’un financement de débiteurs à hauteur de 675 millions de dollars et d’un financement de sortie de 750 millions de dollars des mêmes créanciers, Neiman Marcus est soumis à un processus complexe, chronophage et exigeant en ressources. Au cours de cette restructuration, les magasins et divisions sous-performant risquent d’être réduits ou supprimés.

Après l’annonce en mars de la suppression de la majorité de ses 22 magasins d’usine Last Call, l’entreprise fermera également deux de ses centres de distribution et licenciera environ 500 travailleurs et 250 associés dans des postes non commerciaux.

Selon ses déclarations officielles, le groupe n’entre pas en liquidation, ce qui serait particulièrement difficile au cours d’une pandémie, car il prévoit de se redresser à l’automne de cette année. Compte tenu du montant important des investissements nécessaires pour résoudre les difficultés, les créanciers deviendront les propriétaires majoritaires du groupe.

Il s’agit simplement d’un processus qui permet à notre entreprise d’alléger sa dette, d’accéder à des capitaux supplémentaires pour gérer l’entreprise en ces temps difficiles et de devenir une entreprise plus forte, capable de mieux vous servir et de poursuivre notre transformation à long terme.

Geoffroy van Raemdonck, PDG du groupe Neiman Marcus.

Un autre point dont les spécialistes ont beaucoup parlé à l’occasion du changement de propriétaire qui se profile, c’est l’intention prêtée à Hudson’s Bay de vouloir acquérir Neiman Marcus Group et de le combiner avec Saks Fifth Avenue pour créer un mastodonte de la vente au détail.

Face à des concurrents numériquement agiles, les faillites de détaillants n’ont rien de nouveau.

Au cours des dernières années, des entreprises comme Toys"R"Us, Claire’s and Barneys New York ont également fait la une avec leur faillite et blâmé les géants du numérique comme Amazon pour leurs échecs.

Pourtant, comme Pete Stevens de CBC News l’a rapporté, ce pourrait être la dette qui a affecté ces sociétés plutôt que la concurrence. Selon lui, tout commence par un rachat à effet de levier (LBO) où les entreprises sont retirées du marché boursier pour de grosses sommes d’argent.

En conséquence, pour des entreprises comme Toys“R”Us et Neiman Marcus, une dette de LBO peut atteindre 5 milliards de dollars avec des taux d’intérêt annuels de centaines de millions de dollars : les entreprises doivent alors se concentrer davantage sur les structures et les niveaux de stabilité financières plutôt que sur les opérations réelles.

C’est dans ces périodes que ces marques sont devancées par leurs concurrents numérisés et orientés client, comme Amazon et Farfetch.

Pour ceux qui ne parviennent pas à se numériser, le COVID-19 a aggravé la situation.

Neiman Marcus n’est pas la première chaîne à déposer une demande de mise en faillite pendant le confinement. Le fait est que J Crew et True Religion l’ont fait avant Neiman Marcus. De plus, l’avenir de JCPenney semble également incertain, la société étant confrontée à des difficultés financières.

67 magasins de Neiman Marcus ont été fermés aux USA depuis mars, conformément aux directives établies par les Centers for Disease Control and Prevention en réponse à la pandémie de COVID-19. Dans un tel contexte de limitation du commerce physique, on pense que c’est l’incapacité de l’entreprise à s’adapter à l’ère numérique et au nouveau paysage du luxe qui a conduit à son échec.

Dans une récente déclaration, son PDG Geoffroy van Raemdonck a confirmé que, alors que Neiman Marcus avait fait de « solides progrès » dans l’adaptation à l’essor du commerce électronique, les conséquences du coronavirus ont exercé une « pression inexorable » sur l’entreprise.

Avec la fermeture de tous leurs magasins, les marques de détail comme Neiman Marcus sont confrontées à une réduction de leurs revenus à venir alors que leurs dettes et leurs coûts indirects continuent d’augmenter.

L’avenir du commerce de détail : la connexion des mondes numériques et physiques

Par simplification, on a tendance à associer la faillite de Neiman Marcus à la fin des magasins physiques. Mais il s’agit là d’une hypothèse à laquelle, à Hapticmedia, nous ne croyons pas du tout.

Même à l’ère du numérique, les magasins physiques demeurent décisifs car les consommateurs confessent qu’ils ont besoin que « le toucher et le sentir » fassent partie de l’expérience.

Avec une profonde compréhension des comportements des consommateurs, des géants du numérique comme Alibaba et Amazon ont investi dans des lieux traditionnels de vente au détail qui permettent au public d’interagir avec les produits. Adoptant cette stratégie, Fabletics, la marque née en ligne de vêtements de sport de l’actrice Kate Hudson, s’est aussi installée dans les rues des États-Unis.

Drew Green, PDG du plus grand fabricant de costumes sur mesure, INDOCHINO, souligne qu’en ce qui concerne l’acquisition de clients, les entreprises uniquement en ligne font face à des coûts plus élevés que celles qui ont des emplacements physiques, qui sont capables d’attirer les chalands et même de devenir des points de destination pour les touristes.

En outre, il confirme que les consommateurs qui accèdent à la fois aux canaux en ligne et hors ligne génèrent plus de ventes. «Dans un marché où nous avons un showroom, nos ventes en ligne augmentent deux fois plus vite que dans un marché où nous n’en avons pas», a-t-il déclaré dans une entrevue avec CBC News Canada.

En effet, les magasins physiques, explique l’expert du commerce de détail Doug Stephens, ne devraient pas être évalués uniquement sur la base de leurs ventes mais également de leur valeur médiatique, car les environnements physiques exposent les consommateurs aux messages de manière plus contrôlable.

Comme mentionné dans un autre article que nous avons publié, les emplacements physiques sont extrêmement précieux dans les stratégies omnicanales qui visent à couvrir chaque étape du parcours client pour générer une expérience significative et mémorable qui amène à la conversion.

Une leçon de la faillite de Neiman Marcus : la numérisation

Les canaux numériques et physiques doivent fonctionner de manière coopérative et indépendante

Comme le montre la recherche, les consommateurs omnicanaux génèrent un retour sur investissement plus élevé. Ceux qui achètent des produits de luxe à la fois en magasin et en ligne dépensent jusqu’à 4 fois plus. Pour que cela se produise, chaque canal doit fonctionner en coopération, aux meilleurs paramètres.

Malgré leurs efforts d’investissement dans la technologie pour une meilleure expérience, les grandes marques de détail comme Neiman Marcus peinent à adopter la numérisation. En 2017, la société éprouvait des difficultés à mettre en œuvre un système de marchandisage trans-canaux, ce qui a entraîné une perte importante de 55 à 65 millions de dollars.

Un autre aspect important que les spécialistes du marketing devraient prendre en compte est que chaque canal de commercialisation doit être considéré comme une division commerciale à part entière et pouvoir fonctionner de manière indépendante, même si dans le paysage actuel, ils sont très étroitement liés. En veillant à ce que chaque division soit saine et rentable, les marques ne mettent plus tous leurs œufs dans le même panier. De cette façon, lorsque l’un d’entre eux s’évanouit, le navire peut toujours emprunter d’autres canaux pour rester à flot.

Focus sur les plateformes direct au consommateur (DTC) et les technologies numériques pour offrir une expérience personnalisée

La popularité de l’achat de luxe en ligne ne se dément pas : les paniers ont augmenté en valeur et en nombre, contribuant à 39% de la croissance globale des ventes de luxe.

Il est difficile de parler de commerce électronique sans mentionner la Chine qui a joué un rôle de premier plan dans la transformation du commerce de détail. Avec une consommation en ligne en constante augmentation et 64% d’adoption du commerce électronique parmi les consommateurs chinois, le marché chinois du commerce de détail en ligne compte 650 millions d’utilisateurs et a été évalué à 1 500 milliards de dollars : plus que les 10 autres grands marchés réunis !

Les plateformes directes aux consommateurs se sont révélées très efficaces pour les marques et les consommateurs. Alors que pendant des années, les maisons traditionnelles ont sous-estimé le potentiel du commerce électronique, les histoires de réussite de marques haut de gamme uniquement numériques, comme Reformation et GIA, nous ont démontré le contraire. C’est pourquoi aujourd’hui, même les plus grands noms doivent investir dans les plateformes DTC.

Les avantages du DTC sont indéniables : obtention d’informations sur les comportements des consommateurs et les habitudes d’achat ; transmission mieux contrôlée des messages marketing aux consommateurs ; réduction des coûts sur les magasins physiques, les commissions de tiers et le stockage ; accès à des publics du monde entier ; opportunités de ventes croisées et de ventes incitatives ; haut niveau de personnalisation.

Les consommateurs ont besoin d’une expérience d’achat sur mesure et de produits personnalisés adaptés à la singularité de leurs goûts. Des marques comme Guerlain ont doublé leurs conversions en offrant aux enthousiastes de beauté la possibilité de créer leur propre rouge à lèvres sur ses canaux DTC. Le configurateur 3D conçu par Hapticmedia permet aux fans de maquillage de voir réellement à quoi ressemblera le produit avant de le commander.

Source : Configurateur de rouge à lèvres 3D Guerlain en coopération avec Hapticmedia

La nouvelle expérience d’achat : moins de contacts directs et plus d’outils numériques

Les scientifiques affirment qu’au cours des prochains mois ou années, nous devrons apprendre à vivre avec le COVID-19, sans parler de nouvelles crises à venir. Les interactions humaines directes seront limitées. Les entreprises doivent déployer des outils numériques pour communiquer et dialoguer avec leurs clients.

Les technologies avancées comme les chatbots, l’intelligence artificielle et les mégadonnées sont devenues extrêmement populaires, non seulement pour traiter les demandes de renseignements et les plaintes mais aussi pour proposer des recommandations de produits et des suggestions proactives.

Mais nous pouvons faire plus : cabines d’essayage virtuel, configuration de produits 3D, technologie d’essayage, streaming en direct, réalité immersive, personnalisation à grande échelle. Ces technologies offrent désormais de nouvelles opportunités au commerce électronique car elles permettent aux consommateurs de trouver les produits qui correspondent le mieux à leurs goûts et à leurs exigences.

Les entreprises doivent mettre en place une stratégie de gestion de crise

Depuis des années, des scientifiques et de puissants chefs d’entreprise comme Bill Gates, nous ont avertis après Ebola que nous devions être prêts pour une prochaine épidémie. Le COVID-19 a pris le monde par surprise et révélé que personne n’était préparé.

Personne n’avait anticipé un scénario où nous serions confinés à domicile avec fermeture complète des magasins, des restaurants et des théâtres, des frontières nationales et des aéroports. Cela a pourtant eu lieu et maintenant, nous savons que cela peut se reproduire.

C’est pourquoi nous comprenons que les entreprises doivent sérieusement remettre à jour leur stratégie de gestion de crise pour éviter d’énormes pertes à l’avenir.

Un bon conseil est de développer un système propriétaire ou au moins plusieurs canaux, y compris des applications, des sites Web, des boutiques, des médias sociaux, en vous assurant que chacun d’eux peut fonctionner indépendamment et que vous ne dépendez jamais exclusivement de l’un d’eux.

La numérisation dans le nouveau paysage

Le COVID-19 agit comme un catalyseur pour de nombreuses marques de vente au détail : il contraint les entreprises à déployer de nouvelles fonctionnalités et à assumer de nouveaux rôles. Le fait est que, dans l’environnement en constante évolution d’aujourd’hui, la numérisation n’est pas la solution à la crise mais l’un des chemins à prendre.

References

https://www.nytimes.com/2020/05/07/business/neiman-marcus-bankruptcy.html

https://wwd.com/fashion-news/fashion-scoops/neiman-marcus-bankruptcy-what-to-know-1203565951/

https://www.cbc.ca/news/business/retail-feature-1.4577670

https://www.ft.com/content/d9c4915d-f2f7-4764-a704-bba95747bd5e

https://www.reuters.com/article/us-neimanmarcus-bankruptcy/luxury-retailer-neiman-marcus-files-for-bankruptcy-amid-covid-19-pandemic-idUSKBN22J2AJ

https://www.prnewswire.com/news-releases/neiman-marcus-opens-a-multi-level-retail-experience-at-hudson-yards-in-new-york-city-300810995.html

https://www.businessinsider.com/e-commerce-was-a-lone-bright-spot-for-neiman-marcus-in-a-dismal-quarter-2017-6

https://www.businessoffashion.com/articles/opinion/measuring-the-store-of-the-future

China digital consumer trends 2019

https://wearesocial.com/digital-2020

https://cpp-luxury.com/omnichannel-shoppers-four-times-more-valuable-for-luxury-branded-goods/

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